23/11/2023

Découvrez les résultats de l’étude SOPHIA 2023

Tout comme l’année passée, l’étude SOPHIA 2023 explore plusieurs thématiques d’actualité : sous l’angle « La Suisse de demain », notre institut a interrogé leaders et grand public helvétiques sur des sujets aussi variés que la politique, l’économie, la sécurité, la mobilité, la santé ou encore l’intelligence artificielle. Découvrez les résultats principaux ci-après !

L’étude SOPHIA 2023, dont les résultats ont été dévoilés le 30 octobre à l’occasion du Forum des 100 organisé par le journal Le Temps, a interrogé 300 leaders d’opinion (chef·fe·s d’entreprise, élu·e·s politiques, etc.) et 1555 personnes représentantes de la population suisse. Si ces deux cibles sont d’accord sur un certain nombre de propositions, elles divergent beaucoup sur d’autres.

La confiance dans les différents acteurs qui font la Suisse : résultats assez mitigés

Les Suisses font relativement confiance à leurs pouvoir publics pour les mener dans la bonne direction dans les années à venir. Les Cantons sont les acteurs qui s’en sortent le moins bien, avec 40% de la population qui ne leur fait pas vraiment ou pas du tout confiance. Ce sont surtout les Suisses alémaniques qui se montrent critiques à ce sujet.

Les leaders se montrent très méfiant·es vis-à-vis de la justice, avec 55% qui ne fait pas vraiment ou pas du tout confiance au système judiciaire. Le résultat est meilleur au sein de la population, mais tout de même bien plus bas qu'en 2010 (où 81% des leaders et 72% de la population indiquaient lui faire confiance).

Le niveau de confiance est bon pour les entreprises, mais faible pour les associations patronales et les syndicats (avec bien sûr des clivages gauche - droite importants).

Les Suisses accordent par contre une grande confiance aux universités, à l'école et aux scientifiques. Ils et elles jugent en outre très durement les instances religieuses (seuls 9% des leaders et 15% de la population indiquent leur faire confiance).

La politique et l’économie à la loupe

Plafonner les salaires des dirigeant·es d'entreprises dont la Confédération est le principal actionnaire ? Une idée plébiscitée par 59% des leaders et 81% de la population !

Par contre, pour les leaders, pas question de plafonner le nombre d'habitant·es à 10 millions : cette proposition est rejetée à 73%. L'idée divise beaucoup plus la population, qui s'exprime contre à 47% et pour à 46%.

En matière de congé parental, les Suisses sont majoritairement pour un congé de 38 semaines réparties de manière flexible entre les parents (58%). Chez les leaders, on est plus tièdes, puisque seuls 49% acceptent l'idée.

Autre résultat marquant : sur l'augmentation de l'âge de la retraite à 66 ans pour toutes et tous, les Suisses ne sont pas prêts à entrer en matière puisqu'ils·elles s'expriment à 59% contre (56% pour les leaders). Pour l'instant, l'initiative des Jeunes PLR sur laquelle nous voterons en mars 2024 ne passe donc pas la barre !

Enfin, fidèles à eux-mêmes, les Suisses rejettent les mesures qui leur proposent de travailler moins : semaine de 35 heures, jour férié supplémentaire, revenu de base inconditionnel... C'est non !

Les Suisses relativement préoccupé·es par les questions de sécurité intérieure

Leaders et population acceptent largement l'idée d'un registre central répertoriant toutes les armes à feu et leurs détenteur·trice·s (73% pour les leaders, 81% pour la population).

La population s'exprime également en faveur d'un renforcement des contrôles aux frontières (59%), au contraire des leaders, qui n'en veulent pas (59%).

Les Suisses laissent la porte ouverte à la reconnaissance faciale dans l'espace public, puisque 55% se prononce contre l'interdiction pure et simple de tels systèmes. Du côté des leaders, c'est encore plus clair, avec 65% qui se disent contre l'interdiction.

Au sujet de l'armée, leaders et population rejettent de concert une augmentation du budget annuel (55% et 63%), l'adhésion de la Suisse à l'OTAN (64% et 57%) et le service obligatoire pour les femmes (66% et 65%).

En matière de mobilité, la route est encore longue

Une large majorité de la population accepterait l'interdiction des vols intérieurs (62%). L'idée ne convainc en revanche pas les leaders, qui s'y opposent à une courte majorité de 51%, avec un fort clivage Gauche - Droite.

Un abonnement général dont le prix serait fixé en fonction du revenu ? Là aussi, population et leaders divergent. Le premier groupe est pour à 57%, alors que le deuxième s'oppose clairement (77%), même à gauche.


La généralisation des péages urbains (un concept qui propose de limiter le nombre de voitures en ville en faisant payer les conducteurs pour y entrer) divise les leaders selon un clivage Gauche - Droite classique. L'idée est par contre rejetée par la population (55%).


Malgré les nombreux embouteillages sur les axes routiers très fréquentés, leaders et population s'accordent et rejettent ensemble la création de nouvelles routes et autoroutes (61% et 52%). Fait intéressant : chez les moins de 45 ans, l'idée passe la barre, puisqu'ils s'expriment pour à 54%.


Deux propositions ensuite largement rejetées par la population comme par les leaders : l'interdiction d'utiliser des voitures individuelles dans les grandes villes (non à 65% et 70% respectivement) et l'attribution à chaque conducteur d'un crédit de kilomètres maximum annuel (non à 70% et 74% respectivement).

Santé : la caisse unique, bientôt une réalité en Suisse ?

Dans un contexte de hausse des primes d'assurance maladie et après deux rejets en votation (2007 et 2014), la population suisse s'exprime aujourd'hui à 67% en faveur d'une caisse unique. L'idée est acceptée à gauche comme à droite ainsi que dans toutes les régions du pays. Chez les leaders, la caisse unique ne convainc qu'à gauche.

Dans le même temps, les Suisses souhaitent un accès facilité aux médecines complémentaires, à 75%. Les leaders se montrent plus mesurés.

Fixer le montant des primes en fonction du style de vie ? Pour l'instant, l'idée est clairement rejetée par les leaders (70%). La population s'y oppose également, mais plus timidement (53%).

La légalisation et la réglementation de toutes les drogues ne passe pas la rampe non plus, avec un rejet assez net de la population comme des leaders.

Les répondant·es n'acceptent pas non plus une réduction de leur prime en l'échange de consultations préalables auprès d'une intelligence artificielle.

Des centrales nucléaires qui ont… A nouveau la cote ?

Très intéressant : les leaders sont 50% à s'exprimer en faveur de la construction de nouvelles centrales nucléaires. La population est moins enthousiaste, mais compte beaucoup d'indécis (15%). Ce résultat aurait certainement été impensable il y a encore 4 ou 5 ans… La catastrophe de Fukushima en 2011, qui avait provoqué une prise de décision rapide de la part des autorités suisses, semble bien loin !

Leaders et population s'accordent sur l'imposition des panneaux solaires sur tous les toits d'ici 2035. Cette proposition est acceptée à 57% et 59% respectivement. 

Pour l'interdiction des chauffages au gaz et au mazout (aussi d'ici 2035), c'est oui à 56% chez les leaders (résultat boosté par une forte acceptation à gauche), et une population complètement divisée sur le sujet (pour à 47% et contre à 47% également).

Les deux cibles s'expriment clairement en faveur de la construction de parcs solaires dans les Alpes, mais refusent la construction de parcs éoliens sur les lacs (avec une population toutefois assez divisée sur ce point).

De larges consensus sur les questions de société actuelles

Il n'y aura plus que 39% de femmes au Conseil national lors de la prochaine législature. La Suisse est donc encore loin de la parité, mais vraisemblablement, celle-ci ne s'obtiendra pas par décret dans notre pays : 70% des leaders et 57% de la population s'oppose en effet à l'instauration de la parité aux Chambres fédérales. L'idée séduit toutefois un peu plus à gauche, et en Suisse italienne, où la proposition remporte une large acceptation (79%).  

L'inscription d'un 3e genre neutre à l'état civil met tout le monde d'accord. 65% des leaders et 62% de la population s'y oppose, et la plupart fermement (43% et 40% de très convaincu·es).

En ce qui concerne l'écriture inclusive dans l'administration fédérale, même chanson : les Suisses s'y opposent, les leaders plus clairement que la population (52% des leaders rejettent totalement l'idée).

Nous ne sommes pas prêt·es de voir non plus des panneaux de signalisation non genrés dans nos rues : seuls 22% des leaders sont ouverts à la proposition et 23% de la population.

Sur l’intelligence artificielle, de grands changements depuis 2020

La question de l'IA était l'objet de l'édition 2020 de l'étude SOPHIA, ce qui nous permet aujourd'hui de réaliser des comparaisons intéressantes. En résumé : depuis l'électrochoc amené par la sortie de ChatGPT et autres Midjourney en 2022, les craintes semblent s'être cristallisées.

Si environ 50% des leaders et de la population avait confiance en l'IA en 2020, ils ne sont plus qu'un tiers 3 ans plus tard.

Une majorité de Suisses (54%) estime aujourd'hui que l'intelligence artificielle contribuera à amplifier les inégalités au sein de la société, contre seulement 13% qui pensent qu'elle sera un moyen de les réduire. Plus d'un tiers déclare tout simplement ne pas savoir (une proportion en hausse par rapport à 2020).

Résultat surprenant au vu de ce qui précède : une majorité de leaders (65%) estime qu'il faut poursuivre le développement de l'IA au même rythme qu'actuellement ou l'accélérer. La population est plus mesurée, avec 45% des répondants qui pensent plutôt qu'il faut freiner le développement ou revenir en arrière.

L'Intelligence Artificielle est vue comme un danger en ce qui concerne la protection de la vie privée (pour 77% des leaders et 74% de la population), les relations sociales (60% et 67%) et la démocratie (52% et 56%). Au contraire, elle est vue comme une opportunité pour l'enseignement (surtout par les leaders, à 57%) et la productivité (là aussi surtout par les leaders, à 73%).

Baromètre SOPHIA : nous vivons dans une époque à la fois passionnante et instable

Si notre époque est jugée passionnante (33% des leaders et 21% de la population) ou instable (54% des leaders et du grand public), il est réjouissant de constater que les Suisses sont relativement optimistes quant à l’évolution du pays ces prochaines années. Une grande majorité estime également que notre système politique ne requiert pas de changements profonds, mais simplement certains aménagements.

En comparaison internationale, la population reconnaît de belles qualités à la Suisse : en termes de qualité de vie, d’emploi, d’institution, de sécurité, de formation, de compétitivité économique et de protection sociale, notre pays semble clairement « au-dessus du lot ». Sur d’autres thèmes, comme le niveau des prix par rapport aux salaires ou l’intégration des étrangers, la Suisse est toutefois challengée, surtout par la population qui juge la situation moins bonne que les leaders.

A propos de l'étude

L’étude s’est intéressée, comme chaque année, à deux cibles distinctes. D’une part le grand public, à raison de 726 Romand·e·s, 601 Alémaniques et 228 Tessinois·es représentatif·ve·s de la population âgée de 18 ans et plus. Cette disproportionnalité permet de minimiser la marge d’erreur sur chaque région (± 3,7% pour la Romandie, ± 4,1% pour la Suisse alémanique et ± 6,6% pour le Tessin). Une pondération mathématique permet de retrouver ensuite le poids démographique réel des trois régions dans les résultats totaux (marge d’erreur ± 2,5%). Ces 1555 personnes ont été interrogées au moyen d’un questionnaire auto-administré par Internet du 21 au 26 août 2023.

SOPHIA a en outre consulté 300 leaders d’opinion qui développent leur activité en Suisse. Ils·elles sont sélectionné·e·s en raison de leur réflexion sur le présent et l’avenir de la Suisse, des messages qu’ils·elles diffusent et de la place qu’ils·elles prennent dans la vie publique suisse. Par souci de représentativité, ils·elles appartiennent au monde de l’économie, de l’administration, de la science et de l’éducation, de la culture et de la politique. Ils·elles sont Latin·e·s ou Alémaniques, un tiers a un rayon d’action international et exerce un mandat politique au niveau communal, cantonal ou fédéral. Ils·elles ont été consulté·e·s de mi-août à mi-septembre 2023 à l’aide d’un questionnaire auto-administré en ligne ou sur papier. La marge d’erreur maximale sur cet échantillon est de ± 5,8%.

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